XTerra Hawaï 2015 : la course vue de l’intérieur

Demain dimanche 23 octobre ont lieu les Championnats du monde Xterra 2016 à Maui. Nous avons contacté Fabien Combaluzier qui a vécu la course l’année dernière et nous livre un récit fabuleux de cette aventure et de précieux conseils pour ceux qui veulent tenter l’expérience.

Fabien tu es professeur d’EPS, pratiquant en triathlon depuis 2004 et cross triathlon depuis 2005, tu as participé à la finale des championnats du monde XTERRA l’année dernière en tant que professionnel et tu arrives à une brillante 13^e place, peux-tu nous en dire plus sur cette expérience ?

De Versailles à Maui

« J’ai tout de suite été attiré par les épreuves proposées sur le circuit Xterra. Du triathlon version Super Nature dans des spots magnifiques où ton corps est mis à rude épreuve par des parcours hors normes. La société Xterra a devancé la fédération internationale de triathlon en organisant les 1er cross triathlon sous l’appellation Xterra. La 1ere course a été organisée à Hawaï sur l’île de Maui par 3 copains fans de VTT qui souhaitaient organiser une épreuve dans l’idée de l’Ironman qui avait lieu à Kona. Il existe depuis des épreuves dans de nombreux pays et sur les 5 continents. Le Xterra a été une bonne excuse pour voyage dans de belles contrées. Pour la petite histoire, j’ai aidé mon club de Versailles Triathlon à organiser le 1er Championnats de France de Cross triathlon sous l’égide de la FFTRI.

Partir à Hawaï, c’est forcément magique. D’abord c’est un endroit qui fait rêver et en plus tu y vas pour faire la course contre tous les meilleurs de la discipline. C’est une des chances de notre sport, les amateurs peuvent courir contre de vrai professionnel. Chacun trouve sa place sur la ligne de départ, tu peux juste être un groupe d’âge passionné ou comme dans mon cas un amateur avec une pratique proche du haut niveau qui concourt en Pro. Revenons-en au cadre, Hawaï c’est vraiment magique comme une carte postale. Des plages incroyables de sables clairs, une eau à 30° turquoise dans laquelle tu nages à côté des tortues et un soleil doux du matin au soir. Un vrai paradis à partager entre sportifs ou comme je l’ai fait en famille. Nous étions quatre, Soline ma femme, Noé mon petit garçon de 3 ans et Rose la petite dernière âgée de 4 mois!

Crédit photo : Xterra Travel

Maui le temps du XTERRA : un cadre de rêve où tout est fait pour les athlètes

Quand tu débarques au bout du monde pour le championnat du Monde Xterra, tout est grandiose. Une orga à l’américaine où tout est fait pour le coureur, mais aussi pour le Business! Tout se passe dans un hôtel 5 étoiles même si beaucoup d’athlètes louent un appartement à quelques miles du site de course. Avec ma femme et les enfants, nous étions à 2km dans un super combo très cosy pour environ 100$ par nuit. Rien d’exagéré quand tu es à quelques minutes à pied d’une des plus belles plages de l’île.

Le village course ouvre dès le mercredi, tout se passe au même endroit : retrait des dossards, party d’avant course et d’après course, boutiques officielles Xterra, village partenaire, mécanique vélo (c’est important de pouvoir faire réviser son VTT après la Reco du parcours). Les sponsors de la course sont assez généreux. Pour exemple, les PowerBar étaient offertes afin de permettre à chacun de tester différents produits, un partenaire mobile offrait de nombreux goodies et le sponsor principal, Paul Mitchell, le Jean-Louis David américain, offrait ses coupes de cheveux à demi-tarif!!! Bref, plein de trucs offerts et plein de trucs à acheter, histoire de satisfaire tout le monde!

Reconnaissance du parcours et stratégie

Coté course, comme la plupart des concurrents, j’étais obnubilé par la reconnaissance du parcours VTT. Etant arrivé plus d’une semaine avant la course, j’ai pu prendre tout mon temps pour récupérer du voyage (environ 20h) et du décalage horaire. J’ai fait mes premiers tours de roue sur le parcours le  lundi ou le mardi avant la course du dimanche. Une zone de 7 miles appelée « training practice » est balisée très tôt. Ça correspond au 5 premiers et 5 derniers Km du parcours. C’est un bon résumé de la course, tu fais que monter puis tu fais que redescendre (comme en course à pied d’ailleurs). C’est idéal pour tester les pneus et s’habituer à l’ambiance chaude et humide. Les pneus, ça été pour moi le plus compliqué à gérer car la météo peut changer très vite et que le parcours peut passer en 24h d’un champ de boue à un terrain sec. Je crois que j’ai tout essayé en quelques jours. Je suis devenu un vrai pro du montage, démontage de Tubuless. Mais pour dire vrai, c’est pénible. Tu ne veux pas louper ta course pour une histoire d’adhérence ou de bourrage. Dans l’idéal, il faut venir avec deux paires de roues pour ne pas passer son temps à changer ses pneus.

Pour la sécurité, je conseillerais des pneus renforcés sur les flancs quitte à trimballer un peu de poids en plus. Je conseille de partir avec une paire de pneus roulant en 2.2 avec si possible un pneu avant qui a un peu de contrôle (crampons plus relevés sur les flancs) pour bien adhérer dans les courbes de la longue descente en courbe sur terrain sec et sablonneux que l’on va aborder à la mi-course. Avant d’en arriver là, vous aurez grimpé pendant 10 miles (16km). Prenez également une paire de pneu boue avec le diamètre le plus fin possible pour la roue arrière 1.8 si possible. Les adeptes du VTT semi rigide apprécieront de ne pas voir la boue bourrer sur les haubans arrière.

Depuis la saison dernière j’ai trouvé mon bonheur chez Hutchinson et Spé. Mais vous pourrez trouver le vôtre chez de nombreuses marques telle Maxxis, Michelin ou Continental. Par contre, optez pour des tubuless afin de pouvoir sous gonfler pour augmenter votre adhérence sans risque de crever. Pour Maui sur terrain sec, je conseille une pression de 1.7 pour un coureur pesant entre 60 et 68kg. Avec un coup de pompe en plus, histoire de… ça peut vite devenir compliqué dans la grande descente, je sais de quoi je parle..!

Le parcours complet sera accessible le jeudi et le vendredi. Ayant l’habitude de faire light 2 jours avant la course, je m’aventure sur le parcours dès le jeudi. La reco durera 2h15, ça semble interminable, c’est dur mais que c’est beau. Je me demande comment les meilleurs peuvent rouler autour de 1h30 le jour de la course.

Coté vélo, je ne vois pas comment on pourrait s’en sortir sans un 29’’ mono plateau. A Maui, j’avais un semi rigide 29’’ mono plateau. Un SCOTT Scale 900 RC qui pesait à peine 9kg. Un vrai bonheur dans toutes les montées. J’avais un mono plateau de 32’’ ce qui est très bien pour le parcours. La quasi-totalité du Top 10 était en tout suspendu, ce qui m’a poussé à changer cette saison en m’équipant d’un SCOTT SPARK 900 RC (tout juste 10kg). Le tout suspendu est un peu plus lourd mais il fait gagner beaucoup de temps en descente ou dans les racines mais aussi par l’adhérence que provoque le fait de rouler débloqué y compris en côte.

Jusqu’au matin de la course, je ne savais donc pas si j’allais devoir changer les pneus. La pluie ayant été légère durant la nuit et avec un énorme soleil dès 7h du mat, j’ai donc déposé mon VTT dans le parc avec des pneus roulants. J’avais aussi un Camel back afin de pouvoir m’hydrater autant que possible. Coté chaussure de course à pied, j’ai couru en légère mais l’idéal est d’avoir une paire de trail de 220g ou moins…

Le parc est sur un golf en contre bas de la plage, sur le côté de l’hôtel. Si tu es là, tu es à KAPALUA! Tu sais que quand tu vas sortir de l’eau tu vas devoir courir plus de 400m en montée.

Pour le bonheur de tous, il y a une ambiance du tonnerre et tout est fait pour que chaque participant KIF! Même les arbitres sont cool. Comme il fait chaud, tu peux courir avec la tri fonction baissée pour ne pas te sentir oppressé.

Et la Nat dans tout ça. C’est une plage très grande qui peut certains jours voir déferler de beaux gros rouleaux. Mais c’est très rarement le cas le matin de la course! L’eau est translucide, tu vois le fond en permanence, c’est un vrai aquarium. Coté matos, j’avais uniquement utilisé ma tri fonction mais c’était une erreur, je conseillerai de nager avec une swim suit qui vous fera gagner environ 30sec.

Xterra Maui : la course

La course. Nous sommes fin octobre. Pour faire court, j’étais dans un bon jour et je me suis fait plaisir. Je n’ai rien fait de très bien mais je n’ai rien mal fait. J’ai géré un effort qui allait être dur de par le terrain et la chaleur. Je franchirai d’ailleurs la ligne avec quelques regrets parce que pas si loin du Top 10,  sans doute le genre de regrets qui viennent quand on a réussi une belle perf. Comme on dit, avec des Si, on peut s’imaginer être un autre!

Le départ natation est un moment magique, beaucoup de spectateurs et la plus belle piscine du monde. Forcément tu nages à fond, tu cours pendant la sortie à l’australienne en regardant qui est autour. A la sortie d’eau, tu cours encore à bloc, tes pieds caressent l’herbe du golf, le terrain monte, tu es concentré pour trouver ton vélo et « transitionner » au plus vite. 15e me semble-t-il avoir entendu à la sortie du Parc. Je m’applique à enfiler mes gants en pédalant et ça monte déjà fortement. Je ne m’enflamme pas. Je me laisse déposé par un mec en blanc, un belge qui finira 5e me semble-t-il ? Il est à fond et pas moi mais ça pique déjà les jambes et la tête. J’ai dû faire 2km en VTT!

Je reste calme jusqu’à ce que 2 compères du circuit européen me dépassent. Je sais que je dois faire l’effort pour rester avec eux si je veux faire un bon vélo. Je commence à me faire plaisir. Je doublerai la 1ere fille seulement à la mi-course et je mettrai encore 5km avant de la lâcher. Pour les amoureux de Triathlon, c’est Flora Duffy. Malgré 2 petites gamelles pour sur gonflage du pneu avant dans des courbes en descente à 180° sur une terre bien sèche, je continu à m’amuser. Les jambes sont toujours là quand on remonte la montagne. Je sais que je suis dans un bon jour et c’est bon! A 5km de la fin du vélo, je me fais reprendre par un super VTT, je m’accroche à ses roues et nous poserons avec presque 1’ sur le groupe avec lequel j’étais.

C’est déjà la sortie de T2, un petit sourire de ma femme et des enfants, et c’est partie pour une belle montée de 5km à pied… Il fait chaud j’enlève mon haut de tri fonction pour mieux respirer et je cours. Je double rapidement 2 gars, je sais que je vais faire un Top 15. Alors je fais au mieux. Même dans le 20%, même dans le 25% je cours, pas vite mais je cours, petite bouteille à la main que je garde de ravito en ravito. Chaque miles est affiché, dans ma tête je crois que c’est des km et je suis surpris au 3e de voir que le parcours commence à descendre. Je croyais qu’il restait encore 2km à monter. Lucidité quand tu nous perds! Du coup c’est chouette ça descend et cette partie du tracé est juste magique dans une sorte de jungle avec des arbres à sauter, une végétation luxuriante. Je ne vois personne à l’horizon et pas une personne sur le bord pour m’annoncer ma place. La moindre remontée me pique grave les jambes.

Me voilà sur un bout de route, la dernière difficulté à 1,5km de l’arrivée. 300m sur le goudron a un pourcentage qui fait peur. Chaque pas compte pour arriver en haut et se jeter dans la dernière descente. Je débouche sur la plage du départ, il doit rester à peine 500m, je vois 2 gars au loin. Je donne tout, en  cherchant le moindre appui un peu dur au bord de l’eau. Je me rapproche car les gars sont morts. Je double… jusqu’à franchir la ligne d’arrivée en 13e position. Là, autour de moi, des gars sont écroulés par terre, pas tous mais plusieurs. On m’a mis une serviette imbibée d’eau glacée sur les épaules et ma tête. Je profite, je profite, je crois même que j’en profite encore en écrivant ces quelques lignes. J’ai réussi ma course, ma première participation au championnat du monde Xterra à Maui. Le vainqueur en est à son 15e départ, c’est Josiah Middaugh et c’est sa première victoire.

Dommage que le budget élevé soit tout de même un frein ne permettant pas de participer à cette épreuve chaque année. Si j’ai toujours la forme, j’espère pouvoir y retourner l’année prochaine! »

Et c’est ce qu’on te souhaite Fabien, merci pour ce récit complet qui nous a fait rêver et nous a permis de vivre le temps de quelques minutes un championnat du monde XTERRA à Maui.